Lescarpin et Christian Louboutin
Figure obligée de la mode, peu montent aussi vite - et aussi haut - que Christian Louboutin. Le nom de ce chausseur se voit
désormais écorché dans toutes les langues par l’essaim d’élégantes qui, de Los Angeles à Paris et de Singapour à Monte-Carlo, fait et défait les réputations.Une boutique à Paris, une autre à New York. Des montagnes d’articles de presse, des légions de copieurs. Pourtant, aucune maison de renom, aucune entreprise
de famille n’a mis sur orbite ce créateur de vingt-neuf ans qui conseille Caroline de Monaco et Catherine Deneuve et pare, comme son maître Roger Vivier, les pieds les plus riches et les plus
spirituels du globe.
Tout commença par un panneau devant lequel il s’arrêta, enfant, au musée des Arts océaniens de Paris. Il représentait un talon aiguille, barré de
deux grands traits qui dissuadaient les dames de rayer le parquet. " Je fus hanté ", raconte-t-il avec cette excentricité survoltée qui donne autant de charme à sa
fréquentation qu’à ses souliers. " Pourquoi un talon si fin, si pointu, sinon pour prouver qu’on pouvait créer de l’irréel à partir d’une chose existante ? J’ai passé ma
scolarité à le reproduire sur mes cahiers, sur mes pupitres. "
Sandale liège et cuir
Bientôt, il s’immerge dans le tourbillon de fêtes qui secoue Paris, orientant sur le music-hall son obsession des souliers : " A part les plumes, les danseuses ne portaient guère que des chaussures. Et le soulier m’intéresse avec le corps nu. Le photographe Helmut Newton a senti cet univers : il n’a jamais
fait un nu avec une chaussure plate. En attendant, j’ai fait la tournée des music-halls avec des dessins de sandales. On m’a dit : il n’y a pas d’argent, mon chou... " Et Christian
Louboutin doit retourner à l’école : chez Charles Jourdan, Maud Frizon, Chanel, Saint Laurent, il apprend le b-a.ba.
Ces premiers pas le conduisent à s’établir près de la place des Victoires, à Paris. " La statue de Louis XIV, note Christian
Louboutin, porte l’un de mes souliers préférés : une sorte de spartiate retravaillée. " Les chaussures, qui garnissent sa boutique, ont plutôt l’air d’oiseaux multicolores, figés dans
les niches d’une sorte de colombier. " J’aime que les femmes voient mes chaussures comme de beaux objets, une sorte de bijou hors mode, doué d’un univers propre. Le soulier
n’est pas un accessoire, c’est un attribut. "
Becs mauves ou boutons d’or, boucles en compression, semelles à inclusions de pétales : elles ne se feront guère oublier. " Avec des Louboutin et un jean ou une robe du
soir, on est habillée ", dit l’intéressé, qui enchaîne : " Les femmes s’expriment avec leurs souliers." Les clientes de Christian Louboutin ont du talent. Chez
lui, elles ne se contentent pas de prendre le café. Elles commentent, conseillent... Confient ce qui leur paraît beau, confortable... " Ma boutique est un luxe qui maintient ce
lien. "
Christian Louboutin n’a plus d’univers : il a tout mis dans ses chaussures. Styles Louis XV, géorgiens, orientaux... Porcelaine Wedgwood...
Le violet profond d’une pervenche, le vert pâle d’une mousse, les écorces de bouleaux et les délicatesses de la nature organisée. Il griffonne. S’il rêve, il dessine le rêve. Les quelque 120
nouveaux modèles de l’année se vendront par dizaines de milliers de paires. Mais cet enfant terrible ne veut plus passer pour le sorcier de l’excentrique. " Aujourd’hui, je
m’attache plus à la ligne qu’au détail qui fait mouche. Je dessine en liberté, puis je retranche. Et j’évolue : certains modèles, comme la sandale à bride dorée ornée de nuds, synthétisent
plusieurs souliers. " Saison après saison, " le garçon qui dessinait des souliers " devenait " l’homme aux talons dorés à la feuille ", " l’homme aux talons de canette Guinness "... Aujourd’hui, l’" incredible Mr. Louboutin " est l’homme aux semelles rouges. " Je voulais
rompre la sinistrose des semelles noires ou beiges. Et présenter un objet "fini". Toutes mes semelles sont rouges. " Une marque de fabrique qu’il espère, comme d’habitude, se faire
copier...
Si le coeur vous en dit, vous trouverez Christian Louboutin sur : http://www.myprestigium.com/fashion/fr/produits/m_17/christian_louboutin/